mardi 14 avril 2009

Être parents d'un enfant DYS

I. Avoir un enfant dyslexique n’implique pas que l’on sache que son enfant est
dyslexique

Au départ, c’est un enfant pétillant d’intelligence, de curiosité, d’humour, de charme, un peu intrépide qui fait la joie de son entourage.

Ses maladresses langagières sont interprétées comme des signes d’humour précoce tant sa capacité spontanée à entrer en communication avec tout à chacun est grande.


Qui n’a pas souri avec complicité en entendant cet enfant dire " valabo à la place de lavabo " ou je vais sur " le pottogan " à la place de " toboggan " pour la énième foi malgré les corrections bienveillantes des adultes.

Sa gestuelle maladroite répétée suggère un enfant trop vif, pressé d’arriver au terme des ses projets, qu’il a nombreux tant sa curiosité est insatiable.

Son air étonné, qui peut énerver son entourage, quand il s’agit de s’orienter dans le temps ou l’espace.

Il n’est pas rare que nous, parents, concernés par le trouble ne soyons pas en mesure de comprendre pourquoi notre enfant si pétillant à la maison se métamorphose en enfant mélancolique souffrant de maux de ventre violents dés que l’école se dessine à l’horizon.

La dyslexie connue d’un frère ou d’une sœur, nous permet à nous, parents, de gagner du temps pour la Fratrie.


II. Parents attentifs ou Parents surprotecteurs ?


Nous posons des questions, cherchons la faille au sein de notre foyer mais nous nous tournons vers l’enseignant, notre médecin en exprimant notre inquiétude : " Est-il en retard par rapport aux enfants de son âge "

Le médecin nous rassure : "Votre enfant évolue à son rythme, laissez-lui le temps !"

L’enseignant : -" C’est un manque de maturité " mais aussi " attendons le déclic ".

Pourtant un jour, il faudra bien, tous ensemble, ouvrir les yeux :

Cet enfant a quelque chose qui " coince ", de différent , qui n’est pas un manque de stimulations ,ni un manque de maturité comme on essaye de nous le faire croire trop souvent , en nous incitant à attendre un déclic hypothétique.


Parents, enseignants, médecin traitant s’interrogent mais ne réussissent pas à mettre en relation tous ces appels concomitants qui peuvent s’avérer être, en fait, les signes prédictifs d’un seul déficit : Trouble spécifique du langage écrit et/ou oral.

III. La traversée du désert.

L’entrée dans " le monde de l’écrit " mais parfois à un virage clé de la scolarité, produit un véritable schisme dont on ne mesure pas immédiatement les dégâts collatéraux.

Malheureusement, quelques années scolaires se sont écoulées, et notre enfant vif, intelligent pour lequel l’avenir semblait sans embûche est devenu un élève malmené par la pédagogie qui s’essouffle peu à peu jusqu’au découragement, voire l’inhibition.

Souvent nous demandons à rencontrer les enseignants afin de pouvoir venir en aide à notre enfant en difficultés scolaires pour s’entendre affirmer :

· " Il ne travaille pas assez " ;

· " Il est paresseux " ;

· " Il relève d’un établissement spécialisé "

· " Son problème est psychologique certainement d’ordre familial par des

parents trop protecteurs ou ambitieux "

· Ces difficultés s’estomperont dans le temps quand il aura envie de grandir et

de devenir autonome ". (dans l’air du temps).


Pourtant les enseignants ont souvent tenté de mettre en place au sein de leur classe des stratégies pédagogiques malheureusement inefficaces afin d’aider leur élève.

Stratégies, qu’ils avaient peut-être mises en place, il y a quelques années, pour un autre élève pour qui elles avaient été pleinement satisfaisantes ?

Cependant des stratégies pédagogiques adaptées aux besoins de l’élève, mis en place autour d’un partenariat complet auraient été porteuses de réussite pour l’élève et l’enseignant

L’horloge scolaire tourne inexorablement et nous sommes toujours sur un chemin qui est parsemé de visites médicales, de bilans, de rencontres.

Jusqu’à l’article lu, par hasard, relatant le parcours d’un enfant dyslexique et de sa famille, parcours, qui ressemble tellement au notre et là spontanément nous prendrons contact avec l’association de parents nommée qui nous aiguillera.

Enfin, ses incompréhensions ont une signification : Cet enfant est porteur de Troubles Spécifiques du Langage Ecrit confirmés souvent par le bilan orthophonique.

IV. Parents -Négociateurs " Vecteur d’échanges "

Avec le bilan orthophoniste à l’appui, et à chaque rentrée scolaire, nous reprenons rendez-vous avec les enseignants afin que soient pris en compte les besoins spécifiques de notre enfant. Situation très difficile : Avons-nous toujours été premier de classe ? Comment aborder ces maîtres qui détiennent le savoir ? Pas facile d’oser franchir la porte de l’école !

Nous tentons d’expliquer " les possibles et les impossibles ", de notre enfant.

Que devant un résultat de multiplication, notre enfant n’est pas lent mais le manque d’automatisme l’oblige à repartir de : 1X7 = 7 etc.…pour arriver au résultat demandé.

De solliciter la bienveillance des professeurs devant une rature en expliquant que celle-ci n’est pas un signe de négligence mais de recherche.

Toujours à nous, parents, d’expliquer que notre enfant ne se moque pas des professeurs quand il écrit un synonyme pendant la dictée : " Vélo pour bicyclette ".

Démontrer que cet élève dyslexique utilise sa flexibilité mentale et que c’est un point fort essentiel pour adapter les exigences scolaires.

Tenter de convaincre que l’élève dyslexique peut écrire plusieurs fois le même mot de manières différents bien que ce mot soit inscrit au tableau.

Faire admettre qu’il n’y a pas d’âge rédhibitoire à la lecture et l’orthographe

En fin d’année scolaire, nous devons aussi argumenter le passage de classe ou l’orientation:

  • " La dyslexie n’est pas un manque dans les acquisitions scolaires mais dans la manière d’évaluer l’élève dyslexique ".
  • " L’adaptation des exigences pédagogiques permet d’éviter la situation d’handicap à l’élève qui met l’élève en deçà de ses capacités intellectuelles".

Il n’est pas rare que les professeurs doutent devant un choix de langues étrangères ou les options et refusent, par exemple que le jeune fasse du latin, réservé traditionnellement aux " bons élèves ". Pourtant il est indéniable que, si il est motivé, ces choix seront bénéfiques et alimenteront son appétence à la culture.

N’oublions pas, que nous parlons du même enfant vif, intelligent du départ !

Sans ce relais que nous essayons de faire, la prise en charge de notre enfant reste morcelée : " Bilan ; diagnostic ; rééducation ; scolarité et remédiation "

Notre tâche se trouverait considérablement allégée par la mise en place des projets individuels de scolarisation dans le milieu ordinaire, comme il est écrit dans la circulaire 2002-024 (pas abrogée) et le projet personnalisé de scolarisation écrit dans la loi de 2005.


V. Parents – Taxis ou en quête d’adresses?

Combien de rendez-vous hebdomadaires chez les rééducateurs, orthophonistes, ergothérapeute etc.… parfois pédopsychiatre, psychologue !

Tout en s’assurant que l’enfant comprenne le bienfait de la rééducation malgré le fait qu’à l’école il se sente mal valorisé par ses résultats.

Qu’il n’est pas malade " fou ou débile " que ce n’est pas de la " surmédicalisation " pour cas désespéré !

Nous sommes convaincus qu’il faille aider notre enfant, mais :

· Qui nous précise que la rééducation prendra plusieurs mois et année ?
· Qui nous guide pour cibler les activités à la maison ?

Pourtant, pour une jambe cassée, la kinésithérapie est prescrite, le Kiné nous indique les exercices à faire au quotidien afin de retrouver au plus vite la mobilité de la jambe.

Puis, après des mois de rééducation ,nous nous entendons dire par l’orthophoniste qu’elle ne peut plus rien faire ou que la rééducation est insuffisante et qu’il faut entreprendre d’autres investigations.

· Dans le meilleur des cas , nous serons orientés vers un centre référent, un bilan pluridisciplinaire fait favoriserait la croisée des données médicales et pédagogiques afin de mettre en place une dynamique " pédagogique- rééducative-famililiale " autour et avec l’enfant.

· De nombreux parents " au bord du gouffre " se mettent en quête de "la perle rare" ou "du remède magique".

· Malheureusement, la Dyslexie reste un marché juteux et les sectes et les déviantes méthodes commerciales sont à l’affût.


VI Accompagnement parental

Vous nous avez vu, prospecteurs, galériens puis négociateurs mais aussi chauffeur de taxi et nous arrivons enfin à notre " Vrai Métier : Parents ".

Cependant, si les enseignants, si les rééducateurs n’y arrivent pas alors comment nous, parents, allons faire ?

Imaginez ! Votre enfant qui refuse de manger des légumes… Vous vous allez vous mettre à adapter vos recettes afin d’assimiler les légumes au repas . Et bien, nous parents d’enfants dyslexiques ! Nous faisons la même chose en transposant les légumes aux devoirs.

Nous allons nous mettre à déployer des trésors d’imagination pour aider l’enfant à progresser :

· En essayant de s’adapter aux exigences des enseignants de l’année

· Puis, en s’aidant des conseils de l’orthophoniste, nous allons amener notre enfant à réinvestir progressivement, dans l’apprentissage scolaire, les moyens de compensation qu’il met en place par la rééducation. Ainsi ces moyens de compensations lui permettront de surmonter son manque d’automatisme, d’organisation et de repérage dans le temps.

· Grâce aux rendez-vous avec les enseignants, nous pourrons connaître les thèmes abordés pendant le trimestre. qui nous permettra :

· De les communiquer à l’orthophoniste

· D’essayer de trouver le soutien audio-visuel qui complétera le cours,

· De procurer " le livre cassette " afin que notre enfant garde le plaisir de lire.

· D’aborder une notion ou une stimulation à acquérir à l’aide d’un jeu de société (sur la grammaire, les mathématiques , géographie etc..) .

· De permettre à l’enfant de trouver ses indices en plaçant au dessus de son bureau ou même dans les toilettes etc…des supports.ex un enfant qui confond le B et D , l’affiche sera avec le B qui représentera une future maman…Il existe des affiches colorées sur la conjugaison, les multiplications, le planisphère etc…

· De reprendre tous les jours, les cours de la journée afin de les revoir ou réécrire avec son enfant.

· De l’aider à se familiariser avec les outils d’aide ( calculatrice, dictaphone, ordinateur ; synthèse vocale). Laisser seul un enfant devant une machine ne fait qu’aggraver les choses.

Pour l’équilibre familial et celui de l’enfant, il est important de ne pas douter de ses capacités et donc de prendre du recul et garder en tête que la dyslexie n’est pas un manque de connaissances mais un problème d’évaluation de ces connaissances.
Le bien-être psychologique familial permettra à l’enfant de se sentir compris, ses efforts seront reconnus à leur juste valeur, sans tenir compte de la note.


C’est pour cela que nous ne devons pas oublier de veiller sur l’équilibre psychologique de notre enfant, équilibre qui passe par des temps de loisirs (sport, musique, dessin etc…en respectant les envies de notre enfant) et d’apprentissages alternés , en gardant à l’esprit la stimulation des points forts par des jeux de sociétés qui les stimulent ou les développent.

N’oublions que notre enfant du départ garde sa curiosité alors ouvrons le sur le monde, laissons un peu les devoirs, et emmenons le à une visite de musée, voir un film, une pièce de théâtre ou simplement une ballade en forêt.

Le stress des devoirs quotidiens ou de vacances s’estompera au profit d’une ambiance familiale détendue.

Ces conditions sont nécessaires à une bonne image de soi. Alors l’enfant suivra sa scolarité en puisant sa force dans son potentiel intellectuel.


VII Le partenariat " enseignant –orthophonistes–médecins scolaires - parents " ?

· C’est la possibilité de garder nos valeurs et exigences éducatives.

· D’avoir un projet cohérent avec et autour de l’enfant.

· De ne plus avoir un enfant compartimenté mais pris dans sa globalité

· De dédramatiser une scolarité particulière à besoins spécifiques

· D’être parents, premier éducateur, sans d nous substituer aux professionnels de l’enseignement et de la rééducation : il est utopique de penser que ce qui n’a pas été acquis à l’école peut l’être à la maison dans un temps plus court et/ou à une heure tardive.

· Le médecin scolaire et l’orthophonistes aideront les enseignants dans la recherche d’aides simples à mettre en place. Aides qui permettront à l’élève de ne plus être en situation d’handicap scolaire.

· Parallèlement l’élève poursuivra sa rééducation et continuera ses propres moyens de compensation.

· Ce partenariat permet aux enseignants de s’informer à défaut de formation.

· De parler le même sens sur le même mot .

· De pouvoir écouter les parents qui connaissent parfaitement les plus et les moins de leur enfant.

Depuis le début, Apedys a toujours souhaité et incité les parents à ce partenariat , aujourd’hui nous y arrivons mais surtout il ne faut pas revenir des mois en arrière .

Il y a beaucoup d’enfants ce troisième trimestre qui sont déscolarisés alors ne soyez pas étonnés si vous trouvez quelques phrases sur un bureau qui expriment leur souffrance scolaire :

Voici un texte d’un jeune dyslexique sévère , heureux d’aller en classe d’apprendre, jusqu’à ce changement de lycée où il est confronté à des enseignants qui n’entendent pas et un médecin scolaire qui veut réutiliser ce qui a mis été en place pour un autre élève mais qui ne correspond pas aux besoins de celui-ci..
L’orthophoniste n’a jamais été contactée . Les bilans pointus et détaillés sont dans le dossier scolaire

J’aimeré etre un poignard
pour faire coulé ton sang
comme tu me fais coulé mes larmes.

PMD en classe de seconde.


Alors s’il est vrai que la dyslexie n’est pas mortelle malheureusement les conséquences d’un refus ou l’absence de communication peuvent engendrer des situations dramatiques qui auraient dû être évitées par la mise en place d’un simple projet individuel de scolarisation.

Martine Leroy. Marie-Françoise Wittrant.

(Association départementale d’adultes et de parents d’enfants dyslexiques du Nord(59).

TEL: 03 20 64 29 44 ou 03 20 84 87 99

apedysnord@aol.com

1 commentaire:

  1. Merci à vous pour ce témoignage qui ressmble à notre parcours.

    Mais nos remerciements vont plus particulièrement à votre action car votre discours lors des réunions avec l'équipe éducative a permis de changer le regard sur notre fils . Aujourd'hui, son année est sauvée,il a repris confiance en nous et en ses professeurs. Et grâce à vos documents clairs, précis ,nous avons enfin eu les bons renseignements qui lui permettent d'obtenir les aides aux examens pour son brevet et aussi nous avons préparé son entrée au lycée .

    Merci et surtout continuez s'il vous plait.

    Pascale ,Christophe et Antoine

    RépondreSupprimer