vendredi 16 mars 2012

Jurisprudence: Aménagement des conditions d’examen pour un élève souffrant de dyslexie

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C.A.A Lyon - 6ème chambre - N° 09LY01666 - ministre de l'Education nationale / M. et Mme D. - C+
Voir Droits sociaux et travail
Conclusions de Dominique Marginean-Faure, rapporteur public à la Cour administrative d'appel de Lyon

Le refus de tiers temps supplémentaire est soumis au contrôle normal du juge.
Le code de l’éducation prévoit qu’un temps supplémentaire peut être octroyé aux candidats aux examens et concours de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur qui présentent un handicap ou un trouble de la santé invalidant, afin de garantir l’égalité des chances entre les candidats.
En la matière, le juge administratif exerce un contrôle normal sur la décision de refus de tiers temps supplémentaire opposé par l’administration. En l’espèce, l’inspectrice d’académie se bornait à se référer à un avis laconique du médecin de la commission des droits et de l’autonomie, sans indiquer pour quels motifs les arguments précis et sérieux que les requérants faisaient valoir ne pouvait être retenus, et alors même qu’elle n’était pas tenu de se conformer audit avis.
Par conséquent, la décision de l’inspectrice d’académie refusant de procéder à l’aménagement des conditions d’examen du diplôme national du brevet pour un élève atteint de dyslexie-dysorthographie phonologique, et donc d’un handicap cognitif, est entachée d’une erreur d’appréciation.


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Conclusions de Dominique Marginean-Faure,
rapporteur public à la Cour administrative d'appel de Lyon


M et Mme D. ont formulé une demande en vue de l’obtention d’une majoration du temps imparti au bénéfice de leur fils qui souffre d’une dyslexie-dysorthographie en vue de la session du mois de juin 2009 du diplôme national du brevet .
Cette demande a été rejetée après avis négatif du médecin désigné par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées le 4 février 2009 puis à nouveau le 26 mars 2009 suite au recours gracieux de M et Mme D. et après nouvelle consultation du médecin désigné par ladite commission.
Le tribunal administratif de Grenoble par un jugement du 4 juin 2009 a annulé ces décisions de l’inspecteur d’académie refusant d’accorder un tiers temps au jeune J.
Le tribunal a considéré que les requérants produisaient des éléments sérieux qui pouvaient conduire à remettre en cause le refus opposé . Il s’agit de l’avis d’une orthophoniste et du professeur principal de l’enfant. Le ministre de l’Education nationale relève appel de ce jugement.
Rappelons en premier lieu le cadre juridique.
Afin de garantir l’égalité des chances avec les autres candidats, les candidats aux examens ou concours de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur qui présentent un handicap tel que défini à l’article L114 du code de l’action sociale et des familles bénéficient des aménagements rendus nécessaires par leur situation.
Selon l’article L114 dudit code « Constitue un handicap , au sens de la présente loi , toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques , d’un poly-handicap ou d’un trouble de santé invalidant ; »
La dyslexie génère pour les élèves qui en sont atteints un désavantage important au regard de leurs performances aux épreuves écrites d’examens publics.
Elle a été reconnue comme un handicap pouvant donner droit à des aménagements. Les dispositions spéciales pour les examens ont été étendues aux élèves dyslexiques par une circulaire du 30 août 1985 BO n° 31 du 12 septembre 1985.
La procédure à suivre pour les candidats qui sollicitent un aménagement est définie par l’article D 351-28 du code de l’action sociale et des familles . Ils adressent leur demande à l’un des médecins désignés par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées , le médecin rend un avis qui est adressé au candidat et à l’autorité compétente pour ouvrir et organiser l’examen. L’autorité administrative décide des aménagements accordés et notifie sa décision.
Le ministre qui fait appel, a mal compris le jugement et son argumentation est décalée ; il soutient que les avis médicaux au vu desquels les décisions ont été prises n’ont pas à être motivés et qu’il n’a aucune compétence pour apprécier la pertinence des avis.
Mais une telle argumentation ne peut être que rejetée ; le premier moyen est inopérant au regard du motif retenu par les premiers juges qui ont mis en balance l’avis médical et les éléments produits par les requérants.
Le second moyen est à l’évidence une erreur de droit ; l’avis du médecin est un simple avis qui ne lie nullement l’autorité administrative.
Nous ajouterons que le raisonnement suivi par les premiers juges qui est celui suivi en matière de contentieux des refus de titre de séjour en qualité d’étrangers malades doit être confirmé. La décision de refus d’aménagement des conditions d’examen qui constitue une garantie fondamentale de l’égalité des chances nous paraît entachée d’une erreur d’appréciation .
Les éléments produits sont suffisamment précis et ils ne sont nullement discutés par le ministre.
Par ces motifs, Nous concluons au rejet du recours du ministre.

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